Concernant les modes de gratifications entre vifs

De quoi parle-t-on ?

Il s'agit des donations entre vifs, mais également de la clause de tontine (cf. pour les droits anglo-américains : la joint tenancy with right of survivorship) ou encore des plans de retraite complémentaire avec clause de réversion et de l'assurance-vie (cf. pour les droits anglo-américain : la life insurance). Relève aussi d'un régime dérogatoire le trust (article 1 §2 j[1]).

Quelles sont les questions exclues du champ d'application du règlement ?

La validité en la forme et au fond de ces modes de gratification entre vifs échappent au domaine d'application du Règlement.

Les règles de conflit nationales vont le plus souvent trouver à s'appliquer. Mais pas nécessairement.

C'est ainsi que les conditions de validité de la donation entre vifs de droit commun relèveront dans certains pays, notamment la France ou l'Allemagne, du Règlement Rome I du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles. D'autres États, à l'instar du Royaume Uni, excluront l'application d'un tel texte aux donations. Sans préjuger de la position de la CJUE[2] sur cette question on peut néanmoins rappeler que le point 9 du préambule de la proposition de règlement du 14 octobre 2009 prévoyait que «  la validité et les effets des libéralités sont couverts par le Règlement CE n°593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles » .

Quelles sont les questions relatives aux libéralités entre vifs incluses dans le champ d'application du règlement ?

Concernant les modes de gratification entre vifs précités, l'application du règlement n'a pas été totalement écartée. Il faut ici procéder à un découpage des questions susceptibles de se présenter. Les auteurs du Règlement ont pris acte du fait que dans certains systèmes juridiques – Allemagne, Espagne, France, Italie – la libéralité n'épuise pas ses effets une fois qu'elle a été consentie. Ils ont par conséquent réservé l'application de la loi successorale (article 23 §2 i[3]).

ComplémentEn droit français

Consentie à un héritier en avancement de part successorale, la donation doit être rapportée à la succession au décès du de cujus (le rapport est soumis à la loi successorale). Consentie à un tiers en présence d'héritiers réservataires, la donation doit être réintégrée à la succession afin de déterminer si elle dépasse la fraction du patrimoine dont le défunt pouvait librement disposer et si elle doit en conséquence être réduite (la réduction de la libéralité est soumise à la loi successorale).

Exemple

Soit un de cujus qui consent à un de ses enfants une donation sur un immeuble situé en Espagne. Il décède résidant en France.

En application de l'article 4 §1 c du Règlement Rome I sur la loi applicable aux obligations contractuelles, la validité de la donation sera soumise à la loi espagnole du lieu de situation de l'immeuble. Il en ira de même de son irrévocabilité.

En raison de la dernière résidence habituelle du défunt en France, la loi française sera applicable à la succession. Au titre de l'article 23 §2 i[3], elle s'applique à la question du rapport et de la réduction des libéralités.

En conséquence, la loi française sera appliquée au rapport de la donation portant sur l'immeuble situé en Espagne.

Attention

Il en découle, par ailleurs, que la loi successorale sera aussi applicable aux clauses concernant le rapport (rapport forfaitaire; exclusion du rapport) qui seraient contenues dans la libéralité.