La perspective Langage/Action

Principe

Winograd et Flores (1986[1]) proposent de prendre en compte les conversations pour l'action en usage dans les collectifs afin de concevoir leur système d'information. Winograd liste ainsi les différentes perspectives existantes pour la conception de systèmes d'information : l'implémentation, les contraintes entre un système et son environnement, le processus de traitement de l'information, les rôles, espaces et ressources, les responsabilités des utilisateurs, les conflits ou encore les relations entre usagers (Winograd, 1986[2], pp. 25-27). Chacune de ces perspectives donne à penser et concevoir certains aspects du système.

Winograd et Flores proposent d'ajouter une nouvelle perspective : la perspective « Langage/Action ». Cette perspective de développement a été largement reprise, implémentée, critiquée ou plébiscitée dans le domaine de recherche des TCAO (De Michelis, 1994[3]). Elle a notamment donné naissance aux systèmes de pilotage de l'activité par les procédures et les systèmes de workflow et est à l'œuvre dans la plupart des systèmes de gestion documentaire (Dumas, Van Der Aalst & Ter Hofstede, 2005[4]).

Exemple

Au sein des chaînes éditoriales, la perspective Langage/Action peut être mobilisée pour concevoir la façon dont les différents usagers interagissent à travers le logiciel. Par exemple, au sein de la société Quick, les dossiers d'homologation sont rédigés par un rédacteur et validés par un expert métier. On peut étendre cette procédure comme illustré sur la figure 38 en supposant qu'un chef d'équipe répartit la rédaction des différents dossiers aux rédacteurs.

Figure 38 : procédure de validation d'un DH chez Quick

Dénombrabilité de l'activité

Dourish (2001[5]) prend l'exemple d'une société d'impression ayant adopté un système de gestion de l'activité par les procédures. Lorsqu'un client fait une commande, une procédure est ajoutée au système d'information. Lorsqu'un employé effectue la prestation commandée, la procédure est marquée comme réalisée, puis livrée, puis encaissée. Dourish constate que malgré de nombreuses critiques (réduction de la diversité des tâches à une routine répétable (Suchman, 1985[6] ; Button & Harper, 1993[7]), critique de la mobilisation des actes de langage et du principe de conversation pour l'action (Button, 1995[8]), critique du pouvoir accordé aux concepteurs de systèmes de workflow, produisant souvent des systèmes non fonctionnels (Suchman, 1993[9]), les systèmes de pilotage de l'activité restent massivement utilisés. Il conclut que certains avantages des systèmes de gestion par la procédure n'ont pas encore été théorisés. Son hypothèse réside dans le caractère dénombrable de l'activité : en instanciant des objets informatiques pour chaque action planifiée ou réalisée, les systèmes de gestion par la procédure transforment une activité en liste d'actions  dénombrables, simplifiant ainsi considérablement la gestion de ladite activité.