Artisanat et industrialisation
Définitions
Bachimont définit les concepts d'ingénierie artisanale et d'ingénierie industrielle comme suit.
« L'ingénierie artisanale où le monde est pensé sur le modèle de l'atelier. L'artisan réinvente à chaque fois l'usage de ses outils et improvise pour s'adapter à la nature singulière des matériaux qu'il utilise (les nœuds dans le bois) et la commande particulière qui lui est faite (un meuble unique) »
(Bachimont, 2007[1], p. 12).
« L'ingénierie industrielle où le monde est pensé sur le modèle de l'usine, qui n'est que le passage à l'échelle du laboratoire. Dans ce contexte, le monde se présente de manière cadrée et enrégimentée dans le système de production : les matériaux ne sont plus bruts, mais préfaçonnés en vue de la production. On passe de l'improvisation artisanale à la répétabilité et la standardisation industrielles »
(ibid.[1], p. 12).
Approches artisanale et industrielle
Nous avons donc d'une part une approche artisanale où chaque action est pensée dans un cadre unique et où l'opérateur est contraint de s'adapter aux particularités de son objet. D'autre part, une approche industrielle qui se démarque par une uniformisation des objets traités et par une répétabilité des actions à entreprendre.
Approche industrielle et rééditorialisation documentaire
La notion d'approche industrielle a accompagné le développement des chaînes éditoriales (Bachimont, Cailleau, Crozat, Majada & Spinelli, 2002[2]). L'enjeu était alors de montrer qu'en combinant la séparation d'un fonds documentaire et de ses formes à un principe de rééditorialisation documentaire, les chaînes éditoriales sont des outils permettant de passer d'une production documentaire artisanale à une production industrielle.
Cette opposition entre artisanal et industriel nous semble également pertinente afin de qualifier l'usage de la rééditorialisation au sein d'un contexte de production. La rééditorialisation peut être considérée comme artisanale lorsque la mutualisation de fragments entre documents ou la dérivation de fragments existants se fait à la marge de la production documentaire. Le graphe constitué peut alors être volumineux mais sa complexité est réduite puisque l'interdépendance entre les fragments reste maîtrisable par les rédacteurs. Par exemple, le graphe exploité par Enaction Series, voire l'exemple de graphe mobilisé dans un contexte pédagogique, représentent des contextes de rééditorialisation artisanaux. À l'inverse, on pourra parler de rééditorialisation à l'échelle industrielle pour désigner un graphe dans lequel la mutualisation des fragments est la règle de production et le contrôle de la cohérence sur des fragments interdépendants entre eux est une étape systématique. Les graphes exploités par Quick et par la DILA en sont de bons exemples.